Quand on se lance dans le sertissage, on découvre très vite que toutes les pierres ne se valent pas… surtout quand il s’agit de résistance ! Une améthyste rayée après quelques semaines, une turquoise ébréchée en un clin d’œil… ou pire cauchemar : fendre la pierre d’une cliente au moment de la sertir… Ce n’est pas une fatalité, c’est juste une question de dureté.
Et c’est là que l’échelle de Mohs entre en scène. Cet outil, à la fois simple et redoutablement utile, permet de mieux comprendre quelle pierre choisir pour quel bijou, selon l’usage prévu.
A quoi sert l’échelle de Mohs ?
L’échelle de Mohs est une échelle de dureté mise au point en 1812 par le minéralogiste Friedrich Mohs. Elle classe les minéraux sur une échelle de 1 a 10, selon leur capacité a résister aux rayures.
Le principe est simple :
Une pierre plus dure peut rayer une pierre plus tendre, mais pas l’inverse.
Par exemple, un saphir (dureté 9) peut rayer une amethyste (dureté 7), mais l’inverse n’est pas possible.
Cette information est précieuse en bijouterie, car la dureté d’une pierre influe directement sur sa résistance à l’usure quotidienne. On ne choisira pas la même pierre pour une bague portée tous les jours ou pour une paire de boucles d’oreilles.

Quelques repères du quotidien pour mieux se situer :
- L’ongle humain a une dureté d environ 2.5
- Une pièce de cuivre : environ 3
- Du verre de fenêtre : environ 5.5
- Une lime à ongles en métal : autour de 6.5
- Les outils de bijoutier en acier : entre 7.5 et 8
- Le papier émeris (corindon) : 9
A noter :
- Si votre pierre se raye avec un ongle, c’est qu’elle est trés tendre. Il vaut mieux éviter de la monter en bague ou en bracelet.
- La moissanite, pierre de synthèse trés résistante, a une dureté de 9.5
Bien choisir sa pierre selon le type de bijou
Bague portée tous les jours
Préferez une pierre trés dure (au moins 9), comme le diamant, le saphir ou le rubis. Ces pierres résistent aux chocs légers et ne se rayent pas facilement.
Pendentif ou boucles d’oreilles
Ces bijoux étant peu exposés aux frottements, vous pouvez vous permettre des pierres plus tendres (6 a 7), comme l’améthyste, la topaze ou la citrine.
Bracelets
Evitez les pierres trop tendres comme la turquoise, la perle ou la malachite, qui se rayent ou s’ébrechent facilement. Mieux vaut les reserver à des bijoux occasionnels ou protégés.
Les limites de l’échelle de Mohs
L’échelle de Mohs est un outil simple et précieux, mais elle ne dit pas tout. Elle ne mesure qu un seul critère : la dureté, c’est-a-dire la résistance d’une pierre aux rayures.
Un bijoutier doit aussi prendre en compte d’autres propriétés pour évaluer la durabilité globale d’une pierre. En voici deux, souvent négligées et pourtant tout aussi importantes :
1. La tenacité (ou résistance aux chocs)
C’est la capacité d’une pierre à résister aux coups, aux pressions ou aux chutes.
Et contrairement à ce qu’on pourrait penser, une pierre trés dure n’est pas forcément solide.
Exemple : le diamant est le minéral le plus dur connu (10 sur l echelle de Mohs), mais il est aussi trés cassant. Un choc bien placé (par exemple, une chute sur un sol dur ou un coup sur le rondiste) peut suffire à le fendre ou à l’ébrecher.
C est pourquoi on evite de le sertir dans des bijoux sans protection (type serti clos ou griffes renforcees).
En general :
- Le quartz ou la tourmaline sont relativement résistants aux rayures, mais peuvent casser facilement s’ils sont taillés avec des angles fragiles.
- Les pierres comme l’émeraude, même si elles sont dures (7.5 a 8), sont connues pour leur faible tenacité à cause de leurs nombreuses inclusions naturelles.
2. La stabilité (ou résistance aux agressions exterieures)
La stabilité mesure la capacité d’une pierre à résister à la lumiere, à la chaleur, aux produits chimiques ou à l’humidité.
Certaines pierres sont sensibles à :
- La lumière du soleil (qui peut alterer leur couleur)
- La chaleur (qui peut les faire craqueler ou changer de teinte)
- Les produits ménagers, les cosmétiques ou l’acidité de la peau
Exemple : la perle est relativement tendre (2.5 a 4.5), mais c’est surtout sa stabilité qui est problematique. Elle peut se ternir ou se déteriorer rapidement si elle est exposée au parfum, à la sueur ou à certains savons.
Autre exemple : la kunzite, jolie pierre rose, est assez dure (6.5 a 7), mais elle se décolore à la lumiere du jour.
En resumé
Lorsque vous choisissez une pierre pour un bijou, ne vous fiez pas uniquement à sa position sur l’échelle de Mohs.
Demandez-vous aussi :
- Peut-elle se casser facilement si elle tombe ?
- Va-t-elle perdre son éclat ou sa couleur à force d’être portée ?
- Est-elle adaptée à un bijou porté souvent, ou mieux reservée aux grandes occasions ?
En combinant ces trois critères — dureté, tenacité et stabilité — vous ferez des choix bien plus durables, et vous éviterez les mauvaises surprises à l’établi (ou sur les doigts de vos clients).
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